un article publié dans la Libre Eco du 15 juin 2024

Aude est une étudiante entreprenante qui souhaite arrondir ses fins mois. Elle a surtout une bonne idée d’entreprise et souhaiterait la créer avant d’avoir terminé ses études. Ses parents l’encouragent mais craignent de perdre les avantages fiscaux liés à son statut d’étudiante.

1. De quel avantage parle-t-on ?

Tout contribuable bénéficie d’une quotité exemptée d’impôt de 10.160 €. S’il a un ou plusieurs enfants fiscalement à charge, il peut bénéficier d’un supplément de quotité exemptée d’impôt. Plusieurs facteurs peuvent intervenir pour majorer cette exemption : le nombre d’enfant à charge, le fait que l’un soit porteur d’handicap, ou âgé de moins de 3 ans sans qu’il y ait de déduction de frais de garde d’enfants ou encore que le parent soit considéré comme isolé et/ou bénéficiant d’un faible revenu.

2.       Qui est « fiscalement à charge » ?

L’enfant qui fait partie du ménage au 1er janvier, celui qui habite réellement et de manière durable avec le contribuable, même s’il est temporairement hors de la maison pour des raisons d’étude ou de santé. Il peut donc être en kot ou en Erasmus sans que ses parents perdent le bénéfice de l’avantage fiscal. Et s’il travaille, ses revenus nets annuels ne peuvent excéder 7.010 €.

Le montant net de sa rémunération, c’est le montant brut sous déduction d’une exonération de 3.190 € et d’un forfait de frais de 20% du montant brut ou les frais réels supportés s’ils sont plus élevés que le forfait.

Si Aude fait un job d’étudiant et qu’elle gagne 12.000 € sur l’année, elle ne sera plus considérée comme à charge de ses parents : 12.000 – 3.190 – 1.762 de forfait de frais = 7.048 €. Les quelques euros supplémentaires acquis seront donc très pénalisants pour ses parents.

En outre, ses revenus au-delà de 14.514,29 € brut seront taxables à l’impôt des personnes physiques.

Une autre pénalité impactante est celle où le jeune travaille pour l’un de ses parents. Si Aude aide son père boulanger le dimanche matin et que son père déduit de ses charges sa rémunération, le législateur bienveillant envers les petites entreprises considère que l’enfant ne pourra plus être fiscalement à charge de ses parents… Ç’eut été si simple d’aider une peu le petit indépendant, de favoriser la transmission du savoir-faire, mais non, trop de contrôle pour l’administration, et ça, c’est inadmissible…

3.       Et l’étudiant-entrepreneur ?

Aude souhaite créer son entreprise. Elle est âgée entre 18 et 25 ans, suit des cours dans un établissement d’enseignement en Belgique ou à l’étranger comptant au moins 27 crédits annuels ou 17h de cours par semaine. Elle sera attentive à fréquenter ses cours sauf si son école accompagne son projet. En parallèle, elle s’est inscrite en qualité d’indépendante, ce qui implique pour elle de payer des cotisations sociales pour lesquelles elle bénéficiera d’un régime de faveur :  aucune cotisation sociale ne sera due pour les premiers 8.430,72 € gagnés. Au-delà, les cotisations seront calculées au taux habituel de 20,5% de ses revenus.

Le régime de faveur cesse lorsque les revenus nets s’élèvent à plus de 16.881,45 €.

Aude aura donc intérêt à bien estimer ses revenus pour éviter une trop grande régularisation si elle devait dépasser ce plafond et perdre ainsi son statut avantageux.

 Sur le plan fiscal, Aude devra s’acquitter d’impôt mais bénéficiera d’une tranche exemptée de 10.160 €, ce qui signifie qu’en dessous d’un revenu net de 10.570, aucun impôt ne sera dû.

Si Aude réalise des prestations de service ou des livraisons de bien, elle devra aussi déposer des déclarations TVA et s’en acquitter ou opter pour le régime de la franchise de la TVA si son chiffre d’affaires est inférieur à 25.000 €, auquel cas elle ne pourra pas déduire la TVA qui lui sera facturée.

4.       Aude peut-elle rester à charge de ses parents ?

Si ses revenus sont inférieurs à 8.430,73 €, ses parents continueront à percevoir des allocations familiales et elle sera à leur charge pour ce qui concerne les soins de santé. D’un point de vue fiscal, le montant de ses ressources est identique à celui du jobiste (Cf. point 2). Par contre, si Aude constituée une société liée (filiale) à la société d’un de ses parents, que sa rémunération provenant de la société mère excède 2000 € et constitue plus de la moitié de ses revenus, Aude ne sera plus considérée comme étant à charge. La chance sourit aux audacieux, mais surtout sans l’aide de papa ou maman qui risqueraient d’en profiter… voir la fraude partout risque surtout de freiner les rêves entrepreneuriaux !

Anne-Thérèse Desfosses

avocat – WBGJ –

atd@wbgj.be

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