un article écrit et paru dans la Libre Eco du 12 octobre 2024

Les ASBL sont des entités dont l’objet est l’exercice d’une activité poursuivie dans un but désintéressé.

Elles sont soumises soit à l’impôt des personnes morales (IPM) soit à l’impôt des sociétés (Isoc). En plus de cette taxation, elles sont redevables d’une taxe compensatoire des droits de succession calculée sur la valeur de leurs avoirs mobiliers et immobiliers, dont le taux a été augmenté de manière importante en début d’année, mettant à mal la trésorerie de nombre d’associations.

L’idée du législateur fédéral est de compenser à son profit ( !) la perte subie par les Régions qui ne perçoivent pas de recettes lors de la transmission de ce patrimoine puisque celui-ci est logé à durée indéterminée dans l’escarcelle de l’association.

On constatera avec amusement que la Région ne percevra rien du tout puisque le fruit de cette taxe ne lui est pas attribué. La motivation laisse également rêveur : les associations ne sont pas les seules à avoir une durée de vie indéterminée, les sociétés n’ont pas de limite de durée de vie et les parts de sociétés peuvent être transmises en exonération d’impôt de sorte que leur patrimoine peut échapper au droit de succession sur plusieurs générations. Pourtant, elles ne supportent pas cette taxe.

L’IPM est à priori un régime de faveur

L’IPM porte seulement sur certains types de revenus limitativement énumérés : sans être exhaustif, le revenu cadastral, à certaines conditions les revenus locatifs, les revenus mobiliers, les cotisations d’assurance-groupe, les attributions de pension, rentes ou allocations qui dépassent une certaine limite, les plus-values réalisées sur des terrains, immeubles quand la cession intervient dans les 8 ans à dater de leur acquisition ou 3 ans si le bien a été donné, une partie des avantages de toute nature accordés.

Mais la taxation à l’impôt des sociétés présente aussi des avantages

Si les bénéfices globaux d’une entité soumise à l’Isoc sont taxés, cette entité peut déduire ses charges, ce que ne peut faire une ASBL à l’IPM. Sa base imposable peut donc être nulle ou négligeable et les pertes sont reportées d’une année à l’autre, permettant par exemple le remboursement des précomptes supportés à la source.

L’Isoc offre encore des régimes de déductions spécifiques, pour investissement, pour innovation, pour libéralités ou dividendes déjà taxés etc… qui lui permettent de réduire même parfois à rien l’impôt dû.

Les ASBL peuvent donc avoir intérêt à être assujetties à l’Isoc plutôt qu’à l’IPM. Elles peuvent aussi avoir intérêt à renoncer à leur statut d’ASBL pour se transformer en société puisque ces dernières ne doivent pas supporter la taxe compensatoire de droits de succession.

Quand une ASBL détient un patrimoine immobilier ou financier important, la taxe compensatoire annuelle fixée à un taux progressif sur la valeur de ce patrimoine peut vite alourdir la note.

Une entité se livre parfois, mais pas toujours, à une activité accessoire de caractère lucratif

Ces opérations de nature lucrative se situent fréquemment à la frontière entre l’INR et l’Isoc. Dans ce cas, il faut souvent prendre le temps d’examiner  s’il n’y a pas un intérêt à passer de l’un à l’autre, voire à loger carrément toute l’activité lucrative dans une société.

Cependant, l’ASBL sera toujours tenue au paiement de la taxe compensatoire annuelle, calculée notamment sur la valeur des éventuelles parts de sociétés qu’elle détiendrait, contrairement à une société.

Le régime fiscal des ASBL peut et doit être révisé en profondeur

Il est urgent que le législateur se souvienne que de très nombreuses associations viennent en soutien de l’action publique, quand elles ne pallient pas tout simplement ses carences. Les efforts fournis par nombre d’ASBL permettent à l’Etat de se focaliser sur d’autres urgences. Aussi, reconsidérer le principe de la taxe compensatoire des droits de succession et revoir en profondeur le régime de taxation des associations, en leur permettant d’opter pour le régime fiscal qui leur convient le mieux et de bénéficier par exemple du taux réduit de 5% tel qu’il s’applique aux sociétés de logement serait une avancée significative et une reconnaissance de l’utilité que représentent ces ASBL pour notre pays, que ce soit au niveau culturel, de l’aide aux personnes ou éducatif.

L’Etat devrait se souvenir que ce que les autres font si bien, il ne doit pas le faire lui-même… alors, autant encourager ces bonnes volontés sans faire semblant !

Anne-Thérèse Desfosses atd@wbgj.be

Avocat cabinet WBGJ

Répondre